Moins jeter, mieux manger : La Belgique face au défi alimentaire.
Chaque année, la Belgique gaspille presque 900 mille tonnes de nourriture. De la production à la consommation, les pertes s’accumulent, impactant grandement notre société. De quoi inquiéter de nombreux spécialistes. Mais, comment la Belgique peut-elle réduire ce gaspillage alimentaire et quelles sont les habitudes les plus responsables ? Voyons ce qu’ils nous disent.

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Dans les champs, les supermarchés, les écoles et nos ménages, le gaspillage alimentaire représente un souci de taille. Les chiffres sont alarmants mais peu de monde s’inquiète vraiment. Or, des petites habitudes quotidiennes peuvent changer notre vision des choses. Juliette Vastesaeger, chargée de projet pour Manger Demain, au sein de l’asbl SoCoPro nous éclaire sur les causes et conséquences de ce gaspillage et de cette surconsommation.
D’où provient ce gaspillage ?
Le gaspillage alimentaire commence souvent au sein même de la production. Selon la FAO, un tiers de la production alimentaire mondiale est perdue chaque année. En Belgique, des tonnes de fruits et légumes sont jetés car ils ne correspondent pas aux normes esthétiques imposées par les grands distributeurs. Pommes trop petites, carottes biscornues ou tomates légèrement tachées se retrouvent souvent à la poubelle.
À cela s’ajoute une logistique complexe. Durant leur transport, les denrées s’abîment à cause du manque de conditions adaptées. Les pannes de camions frigorifiques sont récurrentes et peuvent anéantir toute une production que ce soit de fruits ou même de viande.
Dans les supermarchés, les invendus alimentaires s’accumulent et sont souvent jetés faute de solutions pour les revaloriser. La clarté complexe des dates de péremptions provoque également de nombreuses pertes. Beaucoup de consommateurs confondent date limite de consommation (DLC) avec la date de durabilité minimale (DDM) qui elle insinuesimplement que le produit perd en qualité, ce qui n’influence pas son effet sur la santé. Ce malentendu est responsable de 20% des pertes dans nos ménages.
Quelles pertes financières ?
Chaque produit gaspillé fait perdre des ressources précieuses. Produire 1 kg de blé par exemple nécessite 1500 litres d’eau. Jeter ce kilo de blé revient donc à gaspiller toute cette eau utilisée. Cela représente une contribution de 10% des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale. Soit autant que l’aviation civile mondiale.
Le problème est également lié aux conditions sociales. Environ 100 000 personnes dépendent de l’aide alimentaire en Belgique. Alors que de nombreuses familles galèrent à trouver un bout de pain, d’autres vivent la belle vie, ont les yeux plus gros que le ventre et finissent par jeter tous leurs excédents. » Le gaspillage interroge notre éthique », déclare Juliette Vastesaeger.
Sur le plan économique, Juliette nous raconte que ce sont des sommes astronomiques. Chaque Belge perd en moyenne 175€ par an rien qu’en gaspillant de la nourriture. Ce qui représenterait des millions d’euros si l’on prenait l’ensemble de la population.Et cela sans compter les pertes liées à la récolte ou au traitement des déchets.
Surconsommation : enjeu souvent négligé ?

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Le gaspillage alimentaire est majoritairement lié à la surconsommation. Les promotions des supermarchés n’aident en rien celle-ci, elles nous poussent à acheter des produits dont nous n’avons pas forcément besoin. Résultat : des frigos pleins qui finissent par remplir les poubelles.
Une prise de conscience collective est nécessaire pour changer nos comportements. Planifier ses courses est l’élément central à instaurer, afin d’éviter ces surachats compulsifs. Privilégier des circuits courts et apprendre à mieux conserver ses aliments, ce sont des gestes simples mais essentiels. » Réapprenons à valoriser les produits imparfaits et à cuisiner les restes », suggère Juliette. Elle insiste aussi sur le fait qu’il est important d’éduquer ses enfants à la valeur des aliments, en les emmenant par exemple, dans des fermes pédagogiques afin de les sensibiliser.
Des solutions ?
Des initiatives ont vu le jour pour limiter tout ce gaspillage. Too Good To Go, par exemple, est une application mobile qui met en relation les commerçants et les consommateurs en leur proposant des invendus à des prix parfaitement réduits. Ce concept a déjà permis de réduire à grande échelle le gaspillage des commerces. Ou Phenix, une autre application qui elle, redistribue les invendus alimentaires à des associations caritatives afin d’aider les personnes dans le besoin.
Les box repas, comme HelloFresh, Little Green Box ou Quitoque en France, sont une autre alternative. Ces services font des packs d’ingrédients pré-dosés afin de réaliser une recette spécifiquement choisies. Évitant ainsi les achats excessifs et réduisant les restes. Juliette Vastesaeger évoque également les efforts des cantines : » Adapter les portions et offrir un environnement agréable pour les repas permet de réduire les déchets. »
Les circuits courts sont essentiels pour limiter ces déchets. Toutes les pertes liées aux transports sont effacées grâce à ce système. Des marchés de producteurs locaux sont établis dans certaines villes et aident grandement à limiter les dégâts des grandes surfaces.
Enfin la mise en place de composts ou de poulaillers par exemple, peuvent également être bénéfiques car les déchets seraient transformés en engrais naturel ou en nouvelle nourriture. Afin de dégrossir nos poubelles.
Une lutte collective pour notre avenir ?
La lutte contre le gaspillage alimentaire demande des efforts à tous niveaux. Les grandes distributions doivent revoir leurs standards esthétiques en valorisant des produit « imparfaits » car ils sont tout à fait consommables. Juliette Vastesaeger nous souligne que ces standards de beauté imposés par les grandes surfaces écartent des tonnes de produits encore bons et qu’il faut impérativement que ça change.
Les politiques, elles, doivent simplifier les réglementations sur les dons d’invendus, afin d’encourager les commerçants à donner plutôt que de jeter. « Faciliter les dons alimentaires, c’est permettre à des familles en difficulté d’accéder à des ressources essentielles » dit Juliette.
Les citoyens ont aussi leur rôle à jouer. Ils doivent aussi changer leurs habitudes, planifier leurs repas au maximum, acheter local et apprendre à cuisiner les restes.
Pour l’Union Européenne, l’objectif est de réduire de 50% ces déchets alimentaires d’ici 2030. Un effort qui ne peut être réalisé qu’à travers une collaboration internationale. Juliette explique que sans ces efforts, ces objectifs resteront hors de portée.
Réduire le gaspillage alimentaire n’est pas qu’une question de chiffres. Nous devons repenser à nos façons de consommer, en valorisant les ressources naturelles et en renforçant notre solidarité. Car chaque geste qui réduit ces déchets est un pas vers un avenir plus durable.

Sacha Dubois
étudiant en deuxième année de communication à l’ISFSC. Il souhaite travailler dans l’événementiel. Il est passionné par la formule 1, la musique et le football, il en pratique même.